LES RAISONS LOINTAINES DES INNONDATIONS DE CONAKRY
Il y a longtemps que le laxisme de l’Etat s’est fait sentir dans notre pays. Pendant la première République, le problème domanial relevait de la compétence des services publics de l’Etat. Sa gestion a connu à cette époque une rigueur absolue car les contrevenants subissaient de lourdes sanctions. Mais malheureusement avec les nouvelles autorités issues des événements du 3 avril 1984, le problème s’est géré autrement.
La mauvaise application des textes de loi, la privatisation à outrance et la libéralisation sauvage des initiatives privées ont conduit certains guinéens à outrepasser les limites de leur pouvoir. Le droit coutumier va primer sur le droit de l’Etat ainsi, la course au profit poussera ces coutumiers, avec la complicité des cadres véreux de l’urbanisme à un lotissement anarchique. Un même domaine, une même parcelle peut être vendue à deux ou trois acquéreurs. Les conséquences ont été parfois meurtrières en certaines circonstances. Et de nos jours encore on assiste à ces querelles domaniales qui ont causé la ruine de nombreuses familles.
Dans cette euphorie de liberté retrouvée, on a oublié que la vie en cité doit obéir à des principes rigoureux. Depuis la période coloniale, il a été établi un schéma directeur pour la ville de Conakry. C’est vrai que le droit coutumier doit s’exercer mais, son exercice ne devait aucunement porter préjudice au schéma directeur préétabli. Malheureusement la mégalomanie a poussé certains gens à occuper les domaines réservés, à s’installer anarchiquement sur les lieux. C’est pourquoi notre capitale demeurera toujours en chantier car, tout est à refaire à cause du non-respect du principe des services domaniaux.
On se souviendra sous la deuxième République le passage de Bana Sidibé qui a été surnommé ‘’casse-casse, on casse tout’’. Pour donner à notre capitale son véritable visage, il faut faire respecter le schéma directeur or, le respecter suppose la destruction des constructions anarchiques, la prise en compte des espaces de jeux, des lieux de culte, des écoles et des centres de santé.
Un des problèmes liés à cette mauvaise urbanisation est l’embouteillage monstrueux sur les axes routiers de la capitale. Par manque d’espace, les rues n’ont pas leurs dimensions conventionnelles, elles ne peuvent pas contenir le flux de la circulation. Les inondations, les immondices et la trop grande chaleur sont dus au fait que l’air ne circule pas et que les lits des marigots ont été occupés par des constructions. L’eau cherchera toujours à passer quel que soit l’obstacle qu’elle trouvera sur son passage. Le spectacle désolant résultant de ces constructions anarchiques nous offre aujourd’hui cette catastrophe qui a causé le ruine et la désolation de nombreuses familles.
On construit jusque sur l’emprise de la route, tout le monde a été témoin de l’opération de déguerpissement du département de l’urbanisme. Les corniches croulent sous l’insolence des constructions anarchiques, les bordures de mer qui pouvaient être des plages sont illégalement occupées par des indélicats citoyens. Personne ne doit donc se plaindre des enfants qui, par manque d’espace de jeux sont tenus obligés d’exprimer leurs talents dans la rue. Tant que l’on n’apportera pas une solution définitive à ce problème d’urbanisation sauvage, notre capitale n’aura jamais le visage d’une vraie ville.
La pan urbanisation a généré le concept de ‘’Grand Conakry’’ qui englobe Coyah et Dubréka, c’est malheureusement dans cette zone que les turbulences domaniales sont fréquentes avec les constructions anarchiques résultant de lotissements frauduleux. Conakry est devenu une mégalopole il faut le reconnaitre, il subit aujourd’hui une forte explosion démographique qui n’est pas sans conséquence sur l’environnement. Les hommes ont besoin de vivre et pour ce faire ils ont besoin d’espace. Ce besoin d’espace nécessite le respect d’un certain nombre de principes qui, s’ils ne sont pas respectés offrent le spectacle désolant que nous a offert la pluviométrie de ces derniers jours.
On est en face d’une évidence qui demande des mesures strictes et rigoureuses. Aux grands maux, les grands remèdes dit-on souvent donc, il revient à l’Etat de prendre des mesures responsables pérennes et éviter les actions sporadiques légères. L’Etat doit combler son laxisme et son retard dans ce domaine de l’urbanisation par son courage de prendre le taureau par les cornes, cela pour sauver à l’avenir la vie et les peines de plusieurs années d’économie. Il le faut car cela est nécessaire dans la vie d’une nation.